Un jour, en train de picoler sur sa terrasse (comme tous les jours, en fait), Charles reçoit la visite d’un inconnu, qui se présente comme étant son cancer : « Bonjour, lui dit le cancer, je suis votre cancer. Je me suis dit que ça serait peut-être pas mal de faire un petit peu connaissance… »
Le film avait tout pour plaire : Jean Dujardin en tête d’affiche, une bande-annonce assez alléchante, et une histoire originale. De quoi tomber facilement dans le panneau. Car dès la minute où les lumières s’éteignent pour laisser place au générique de début, c’est dans un bain d’ennui profond et d’incompréhension totale face à tant d’inepties que l’on plonge. Et ce n’est pas Albert Dupontel (impeccable, et c’est bien le seul) qui nous sauvera de la noyade.
Déjà, il y a la musique. Le réalisateur a sans doute voulu essayer de rendre hommage aux vieux thrillers favoris de sa vidéothèque, avec cette bande-son plus horripilante qu’autre chose. Car au lieu de produire l’effet escompté (c’est-à-dire nous immiscer dans cet univers, qui se veut complètement déjanté), elle ne fait que nous dégoûter de cet agaçant Bruit des Glaçons, au fur et à mesure que le temps passe.
Après, il y a les dialogues. Si le premier quart d’heure, ça passe plutôt bien, avec les délicieuses joutes verbales que se lancent tour à tour Dujardin et Dupontel, la niaiserie finit par prendre le dessus le reste du temps. Car il faut savoir que le réalisateur a aussi voulu réaliser un film théâtralisé. Sauf que le théâtre au cinéma, et bien ça n’apporte, si ce n’est du ridicule justement. C’est donc à cause de ça qu’on a la désagréable impression que tout est surfait, des dialogues à la mise en scène, en passant par le jeu des acteurs.
Et puisqu’on y est, parlons des acteurs ! Autant j’adore Jean Dujardin et son jeu d’acteur, autant ce rôle ne lui va pas du tout ! Mais pourquoi s’est-il embarqué dans cette galère ? Pourquoi ? Qu’il retourne dans des films du style « 99F » et autre « OSS 117″, c’est ça qui lui va le mieux. Quant aux rôles féminins, je n’en parle même pas : on a à faire à des quarantenaires romantiques et cruches, dont les seuls mots qui viennent à leur bouche sont « peine », « souffrance » et « chagrin ». C’est bon, on a compris que pour vous, rien ne valait la peine de vivre (d’ailleurs, on a droit à un discours philosophique très intelligent sur la question). Et Christa Theret… Qu’est-ce qu’elle est allée faire, elle aussi, là-dedans ? En tant que jeune fille russe, elle n’est pas crédible une seule seconde. En tout cas, Bertrand Blier l’a très bien compris : le ridicule ne tue pas.
Quant au scénario, il est la cerise sur le gâteau de cette grosse épave cinématographique. Rien ne semble logique, tout est mal mis en scène (à part le flashback de Stanislas, le fils de Charles) et la fin est vraiment grotesque. Franchement, quel est l’intérêt de voir le cancer de Louisa (la bonniche, comme ils l’appellent tous) danser le flamenco sur une table de salon ? Quel est l’intérêt de voir ladite Louisa s’envoyer en l’air avec un gamin de seize ans ? Je crois que le pire, c’est la scène où Jean Dujardin et Emile Berling se retrouvent dans la bibliothèque, en train de s’avouer mutuellement leur amour de père envers son fils, et vice-versa. Honnêtement, j’ai vraiment cru voir une scène d’Amour tout court (inutile que je vous fasse un dessin) !
Le Bruit des Glaçons est donc ce qu’il y a de plus détestable dans le cinéma français. En d’autres termes, tout dans ce film est à la ramasse. D’ailleurs, ce dernier aurait dû s’intituler : « Le bruit de la fourchette que l’on gratte sur l’assiette ». Cela dissuaderait ainsi les plus curieux de vouloir subir un tel calvaire.