J’avais beaucoup d’aprioris avant de voir Jackie de Pablo Larraín. Je m’attendais effectivement à un énième biopic pompeux, cirant de manière « hypocrite » les bottes d’un autre symbole américain patriotique. Puis, au vu de son succès critique et public Outre-Atlantique, ça me confortait davantage dans ma position. Pourtant, non seulement Jackie rend fidèle à la grande figure que fut l’épouse de John F. Kennedy, mais il parvient également à dresser un portrait réaliste de cette dernière.
Si Jackie assume résolument son parti pris, il n’est cependant pas sûr que cela plaise à tout le monde. Car Pablo Larraín nous montre à la fois le personnage public et l’épouse vulnérable sur laquelle pèsent une pression et un héritage énorme.
Dès les premières secondes du long-métrage, on cerne d’emblée Jacqueline Kennedy et découvre ainsi une personnalité complexe, qui ne laisse rien au hasard dans ses faits et gestes. Si la majeure partie de Jackie se passe durant la semaine qui suit l’assassinat du Président Kennedy, il s’attarde judicieusement sur un moment passé précis de son court séjour à la Maison Blanche (avec un clin d’œil « filmique » qui devrait plaire aux nostalgiques de cette époque-là).
Par conséquent, cela nous permet d’être d’abord exaspéré par cette femme trop « parfaite », avant de s’attacher à celle qui a de plus en plus de mal à cacher ses failles.
Cette complexité passe par le jeu d’actrice de Natalie Portman. Durant le premier tiers, j’ai pensé que l’ensemble sonnait faux, que tout était calculé de A à Z. Je sentais alors la semi-déception venir à grands pas. Mais voilà, Pablo Larraín joue avec la caméra et la bande son (composée par Mica Levi) pour dévoiler au spectateur les différentes facettes de son héroïne. Ce qui fonctionne à merveille ! Certes, la musique est parfois forte et peut agacer, mais elle correspond bien aux émotions que le personnage ressent à cette période précise de sa vie. Comme les plans de caméra qui la mettent si bien en valeur tout du long, la rendant ainsi photogénique. Ce qui fait que Natalie Portman parvient à s’imposer dans cette partition délicate.
Le premier rôle de Jackie était pourtant difficile à interpréter. Mais la jeune trentenaire ne laisse rien au hasard dans son jeu d’actrice, de l’accent de l’épouse Kennedy à l’attitude de celle-ci, en passant par ses interactions avec son entourage. La nomination aux Oscars est donc bel et bien méritée ! Cela dit, elle n’est pas la seule à nous convaincre de son talent indéniable, puisque ses partenaires à l’écran s’en sortent aussi admirablement qu’elle. On retient notamment les performances respectives de Peter Sarsgaard, de John Hurt, de Billy Crudup et de Greta Gerwig.
Et, bien évidemment, je ne peux pas ne pas mentionner John F. Kennedy, tant son ombre plane sur Jackie. On sent que c’est un Président qui a marqué son époque, tout en laissant une empreinte intemporelle après sa mort. Son apparition finale et furtive est d’ailleurs surprenante. Mais en quelques minutes, cela nous rappelle le grand homme qu’il fut et qu’il sera toujours. Et ce, malgré les défauts de sa politique, que le biopic de Pablo Larraín n’hésite pas à mentionner dans son scénario, afin d’appuyer la construction du deuil de Jacqueline Kennedy. Chacun a donc des choses à se reprocher et Jackie montre cet état de fait avec retenue et justesse.
Jackie est donc pour moi une immense œuvre qui, bien plus qu’une simple succession d’événements dans l’Histoire des États-Unis, offre une belle réflexion sur l’Amour, le deuil et l’être humain. Un film qu’il faut aller voir, en somme.