Je commence ce nouvel article par un coup de gueule envers Sony Pictures Releasing France : comment Billy Lynn’s Long Halftime Walk peut-il être distribué dans une vingtaine de salles françaises seulement ? Sachant que le précédent film d’Ang Lee, Life of Pi, avait bien marché. En plus, après avoir vu Un jour dans la vie de Billy Lynn, j’ai appris qu’il avait été tourné en 3D, en 4K et en 48 images par seconde. Du coup, j’ai vu une version « inachevée ». Bon, j’ai trouvé le film bien dans son ensemble. Mais, maintenant que j’en sais plus, je suis curieux de le voir dans sa vraie version. À présent, laissez-moi vous parler du dernier Ang Lee.
Les premières minutes laissent présager un énième film larmoyant sur la guerre et ses conséquences et, qui plus est, un film qui dépeint l’Amérique sous son plus beau jour. Eh bien, pas du tout ! Et c’est ce qui m’a agréablement surpris ici. Billy Lynn’s Long Halftime Walk est effectivement une histoire qui rend hommage aux soldats américains, qu’on envoie faire la guerre en Irak (ça se passe à l’époque où Bush était au pouvoir). Et, dans le même temps, on nous montre la vision faussée que les gens ont de l’armée, et ce, avec beaucoup de justesse. D’un côté, certains sont fascinés, au point de vouloir s’engager dans l’armée, parce qu’ils veulent avoir un véritable avenir. De l’autre, d’autres se moquent ouvertement d’eux ou veulent en profiter (avec cette idée d’Hollywood d’adapter le récit « héroïque » de William Lynn sur grand écran, avec Hilary Swank dans le rôle de Billy). Ang Lee va donc dans une direction inattendue, avec Un jour dans la vie de Billy Lynn.
La mise en scène regorge également de belles trouvailles. J’ai même l’impression que, à travers cette dernière, Ang Lee adopte un point de vue ironique (à la fois léger et sombre) sur la question qu’il pose dans son œuvre. Je pense, par exemple, à la séquence où les (fausses) Destiny’s Child vont venir chanter sur scène à la mi-temps et qu’on demande alors aux soldats de venir parader sur scène, pour que tout le monde les voie. Cette séquence est drôle et, dans le même temps, dure à regarder. Parce que la situation est tellement ridicule, tant on sent l’incompréhension et le malaise des personnages sur le moment. Et elle est dure, car c’est à ce moment-là qu’on voit bien qu’ils ont été traumatisés par la guerre, qu’eux seuls savent ce que ça fait (en plus de la sœur du héros).
Billy Lynn’s Long Halftime Walk est, en outre, porté par un casting juste de bout en bout. Au centre, nous avons le jeune premier Joe Alwyn, qui porte à bout de bras ce très bel ensemble. Alors qu’il ne s’agit pas forcément d’un rôle simple à interpréter. Je pense même qu’il aurait largement mérité sa place aux Oscars cette année. Autour de lui, les seconds rôles gravitent et le portent dans sa quête intérieure, chacun à sa manière. Et il y a du beau monde : Kristen Stewart, Steve Martin, Chris Tucker, Vin Diesel, Garrett Hedlund et Ben Platt, entre autres. Ang Lee prouve ainsi qu’il est doué lorsqu’il s’agit de diriger ses acteurs.
Un jour dans la vie de Billy Lynn est bel et bien un film inattendu, dans tous les sens du terme. Certes, il n’est pas parfait, car la mise en scène est parfois « grossière », bien qu’inventive. C’est dommage qu’il soit passé inaperçu aux États-Unis et que les critiques américaines n’aient pas été bien tendres avec l’œuvre d’Ang Lee. Cependant, maintenant que je l’ai vu, je pense savoir pourquoi ils n’ont pas aimé. Billy Lynn’s Long Halftime Walk aura le même parcours chez nous, vu l’absence de promotion et la distribution catastrophique du film. Encore un long-métrage incompris malgré sa qualité indéniable.