Je redoutais de voir ce film pour diverses raisons. La première, c’est que je n’avais pas aimé The Florida Project (malgré son côté réaliste). La seconde, c’est que je craignais le discours prôné par le réalisateur Sean Baker au sujet de la prostitution. Résultat : le film est sympathique dans l’ensemble — il faudra juste m’expliquer la Palme d’or —, mais son message de fond est dérangeant selon moi.
Pour parler d’Anora en lui-même, je reconnais que c’est un bon film. À mes yeux, ce n’est pas le long-métrage de l’année 2024 et il ne méritait pas la palme de Cannes (The Substance ou Emilia Pérez a davantage la carrure du grand vainqueur). Le premier acte m’a beaucoup ennuyé et la dernière scène m’a laissé un goût amer. En revanche, j’ai été happé par le deuxième acte avec la « course-poursuite » en plein New York : c’est super bien écrit, mis en scène, joué et bourré d’humour. J’admets également que Mikey Madison livre une très bonne performance, en dépit de son personnage détestable. De même que les autres acteurs, dont les « antagonistes » sont sympathiques pour la plupart (oui, oui !). Donc, en soi, le film se laisse bien regarder.
Maintenant, je trouve que Sean Baker ne parvient pas à rendre attachantes ses héroïnes. Dans The Florida Project, la petite fille et sa mère étaient de vraies têtes à claques. Alors qu’on était supposés avoir de l’empathie pour elles ! Dans Anora, c’est pareil. Le personnage éponyme est antipathique, bien qu’elle ait censé avoir une situation difficile à cause de son métier. Qui plus est, elle est insupportable. D’ailleurs, entre elle et son copain, je ne savais pas lequel était le plus idiot et détestable des deux. Cependant, j’avoue avoir eu de la peine pour elle, quand elle se rend compte que son mari ne l’aime pas du tout. Paradoxalement, c’était tellement drôle de la voir hurler comme une furie face aux gros bras qui, eux, avaient peur d’elle. Le film parvient ainsi à tourner en ridicule ses personnages, et ce, de manière habile.
En outre, le discours de Sean Baker comme quoi « les personnes qui se prostituent sont les ouvrières et ouvriers du XXIe siècle » ne tient pas la route ici. Il aurait d’ailleurs eu plus de sens dans The Florida Project où, pour le coup, la mère s’envenime dans une situation précaire malgré elle. Dans Anora, l’héroïne choisit la prostitution pour gagner de l’argent facile. Ce qui est son choix et son droit, certes. Mais comparer sa situation à celles de personnes qui triment vraiment dans leur vie relève du foutage de gueule, selon moi. Quant au fait qu’elle s’offusque parce qu’on la traite de « prostituée », voire de « p*te » (ok, là c’est vexant), c’est hypocrite, vu que c’est son métier. La preuve qu’encore une fois, le jury cannois est hors-sol, en étant persuadé que la prostitution est quelque chose de glamour, voire féministe, alors que non.
Enfin, on nous a vendu ce film comme une romance « à la Cendrillon » (il y a d’ailleurs une référence dans les dialogues qui est aussi subtile que le bruit des talons hauts de l’héroïne). Personnellement, je n’ai rien vu de tel. Je me suis même demandé si elle l’avait épousé par amour et/ou juste pour son fric. Et puis, je trouve que leur « histoire d’amour » est mal développée. Pour le coup, je me suis senti un peu berné.
Pour conclure, Anora de Sean Baker a surtout de l’intérêt pour sa deuxième partie. Pour le reste — le message bien-pensant douteux, l’héroïne qu’on peine à supporter et la pseudo romance —, on repassera.
Et vous, avez-vous vu Anora ? Si oui, qu’en avez-vous pensé ? N’hésitez pas à me donner votre avis en commentaire !