De la Star Academy, il en reste peu qui ont réussi à tirer leur épingle du jeu et à faire perdurer leur carrière : Jenifer, Nolwenn Leroy, Olivia Ruiz, Élodie Frégé… Et puis, il y a eu les autres ex-candidats du télé-crochet, ceux qui ont réussi à faire passer leurs singles respectifs à la radio, voire à sortir un album studio ou deux, avant de retomber dans l’anonymat. Emma Daumas est de ceux-là, malgré un début de carrière prometteur. Aujourd’hui, elle revient changée et plus apaisée avec Vivante, un EP de six titres qu’elle a entièrement écrits et composés.
Emma est une artiste que j’ai beaucoup écoutée durant mon adolescence. De Tu seras à You Got Me, en passant par J’attends et Figurine humaine, elle a su faire chavirer mon cœur, avec des mélodies et des paroles qui me parlaient bien à l’époque (et que j’écoute encore avec plaisir aujourd’hui). Souvent accusée d’être la pâle copie française d’Avril Lavigne, à l’époque où celle-ci et ses collègues avaient rendu la pop/rock en vogue, elle a pourtant su s’éloigner de cette image pour aller vers un style plus féminin (Effets Secondaires, son deuxième album sorti en 2006), voire plus intimiste et décalé (Le Chemin de la Maison, paru en 2008). Après des années d’errance, elle sollicite l’aide de Maxime Forestier, son mentor depuis toujours, afin de se trouver comme artiste et femme.
En parallèle d’un roman semi-autobiographique intitulé Supernova, l’EP Vivante est le passage définitif à l’âge adulte de la charmante avignonnaise. Mise en lumière sur des titres qui ont tardé à voir le jour, mais dont l’attente valait bel et bien la peine…
- Le présent: cette première chanson est synonyme de remise en question pour Emma, pour se dire à elle-même que le passé et ses actes ne pourront jamais la définir ; son chant est alors empreint de sagesse et de douceur, ce qui contraste beaucoup avec la jeune idole des adolescents qu’elle était ;
- 14 heures du matin: les cordes ne sont désormais plus seules, et c’est avec plus d’entrain qu’elle nous chante sa rupture avec un ancien amant, avec des sentiments bien contradictoires (l’envie de tout quitter et celle de se raccrocher à ce qu’il lui reste) ; une fois encore, la voix est posée, tandis que sa tristesse est plus intérieure qu’extérieure (contrairement à Solo de nuit et Reste du premier album, par exemple) ;
- Les promesses en l’air: comme Emma Daumas, on s’est laissé emporter par l’amour fou, un jour ou l’autre, même en sachant que l’Autre nous trahirait tôt ou tard (avec un infime espoir du contraire, néanmoins) ; ces Promesses en l’air traduisent très bien ce sentiment ambigu et, pourtant, ô combien humain ;
- Ce que veulent les princesses: l’ironie naïve habitait déjà la chanson précédente, elle habite également celle-là plus que jamais, tant elle parle de son sujet avec fougue et sagesse ; la chanteuse regarde alors ce qu’elle était d’un œil amusé, mais éloigné, puisqu’elle en parle à la troisième personne ; une fois de plus, on adhère à cette écriture à la fois innocente et ciselée ;
- Le vieux saule: les guitares sont de sortie dans ce morceau presque énervé, aussi bien dans la mélodie que dans la voix ; on penserait même au Saule pleureur de sa camarade Olivia Ruiz, sans le côté « brut » de la chose ; ici, elle parle avec sagesse de l’importance du temps qui passe, nécessaire pour trouver la paix intérieure en soi ;
- Mon homme: on finit par une sorte de règlement de comptes, non pas avec elle-même, mais avec son Autre ; là où, dans la pop/rock énervée de À ma place, elle clamait haut et fort qu’elle était cette personne-là (et pas une autre), elle reconnaît maintenant que les autres l’ont effectivement mal jugée, en plus de s’être mal perçue elle-même à l’époque ; la fin de ce chemin en soi lui permet alors d’avoir des sentiments qu’elle avait perdus pour son Homme ; l’introspection est ainsi réussie et lui fait du bien comme elle nous en fait également.
Pour conclure, oui, Emma Daumas s’est définitivement trouvée en tant que personne. De celle qui était formatée par et pour les médias, elle s’est progressivement mue en une artiste indépendante accomplie, qui parle elle-même de ses sentiments (quand les autres le faisaient à sa place, à ses débuts). Elle met ainsi les bons mots sur la quête intérieure, le deuil du passé mal vécu et la « douleur » que procure le passage à l’adulte (qui est inévitable, et ce, pour tout le monde). Un EP que je vous recommande d’écouter, si possible en faisant abstraction de l’ancienne Emma.
Sur ces belles paroles, je vous propose de découvrir les coulisses de l’album en vidéo, si vous voulez être davantage convaincus…